Non aux ambassadeurs de l’inégalité numérique !

Destinataire(s) : Ministère de l'Economie, des Finances et de la Relance
Non aux ambassadeurs de l’inégalité numérique !

Non aux ambassadeurs de l’inégalité numérique !

Dans le cadre de la situation économique et sanitaire actuelle, le gouvernement vient de lancer un appel à projets plutôt surprenant. En effet, il demande à des opérateurs du numérique de proposer « gratuitement ou à tarif préférentiel » des solutions pour que les PME et artisans puissent continuer leurs activités en ligne. Si l’idée peut paraître, au premier abord, louable, le développement de tels projets risque, pourtant, d’être totalement contre-productif. Pire cela pourrait même être générateur de nouvelles inégalités et avoir des conséquences désastreuses pour ses « bénéficiaires ».

L’inégalité numérique renforcée

L’État propose aux prestataires du numérique d’offrir un site marchand aux artisans et PME avec mise en place d’une solution de paiement, d’un système de livraison, d’actions de communication et référencement. Les objectifs sont donc définis, mais… c’est tout !
Aucun cadre, aucun cahier des charges et surtout aucune réflexion sur ces questions pourtant essentielles :
Quelle justice pour les commerçants ayant choisi d’anticiper la situation ?
Lors du premier confinement, beaucoup de TPE et PME ont essayés de s’en sortir en faisant appel, sur leur propre fonds, à des prestataires informatiques. Ils ont financé leur présence en ligne au prix de lourds investissements. Loin d’être récompensés pour cette adaptation et cette prise de risque, ils subiront donc ici une profonde inégalité .
Quels seront les entreprises et artisans bénéficiaires ?
Les critères d’éligibilité sont flous, voire inexistants. De plus, les « bénéficiaires » seront-ils prêts à s’investir dans la gestion d’un site ? Il faudra, en effet, qu’ils aient le temps et les connaissances pour, entre autres, gérer un stock en ligne, créer et ajouter des fiches produits et services, prévoir les frais d’emballage, organiser le conditionnement, assurer un SAV en cas de problèmes de livraison ou autres, etc.
Une nouvelle inégalité se dessine : entre une PME de 40 personnes et un indépendant les possibilités ne seront là aussi pas les mêmes !

Quel délai ?

Créer un site un minimum sérieux, demande du temps. En plus du site en lui-même, il faut notamment développer une identité visuelle, définir les fonctionnalités essentielles, etc. La liste est longue. Avec une clôture des dossiers au 13 novembre, la mise en ligne d’un site correct ( c’est-à-dire apportant un minimum de plus-value à son propriétaire en termes d’image et d’efficacité et non pas un simple site générique) ne devrait pas voir le jour avant l’année prochaine. Espérons-le donc bien après le confinement !
Il y a-t-il eu une étude du besoin et la demande ?
S’il n’y a pas de cahier des charges, il n’y a bien entendu pas non plus d’étude de marché et d’analyse de la demande. Comment alors être certain, sur une décision si rapide que les retombées seront positives ? Avoir un site demande du temps et une adaptation de la part des PME et artisans, mais comment leur assurer dans ce contexte morose que les clients seront au rendez-vous ?
De plus, il faudra du temps supplémentaire pour que leur site soit référencé ou qu’une campagne de communication porte ses fruits. Alors que les grandes surfaces et grosses plateformes de ventes en ligne voient leur chiffre d’affaires exploser grâce au confinement, le problème ne se situe-t-il pas ailleurs ?
Comment oser laisser penser qu’avec son site un petit commerçant pourra rivaliser face à ces géants de la communication et du marketing ?

Une concurrence faussée pour le domaine du développement.

Si les grands groupes informatiques sauront sans doute s’engouffrer dans ce projet afin de bénéficier d’une publicité gratuite, qu’en est-il des PME et indépendants ? Développer un site demande du temps et des ressources. Pour un indépendant cela peur représenter un mois de travail sans aucun revenu. L’État n’est ni plus ni moins qu’en train de proposer de déshabiller Pierre pour habiller Paul. !
Dans ce cadre, les PME et indépendants ne pourront certainement pas postuler. Cela leur ferme une partie du marché et fausse totalement la concurrence.
Les prestataires informatiques ne sont pas des organismes d’État et n’ont pas à contrebalancer ses failles et insuffisances. Sinon, dans ce cas, va-t-on demander aux fournisseurs d’énergies et d’internet d’offrir électricité et connexion aux professionnels qui réaliseront les sites gratuitement ?

Des risques au niveau de la sécurité, de la protection des données et de l’environnement

Au-delà de l’inégalité numérique, ce projet risque également d’avoir des conséquences désastreuses dans bien d’autres domaines.

Risques au niveau de la sécurité et de la protection des données

Peut-on garantir qu’un site développé en urgence et gratuitement fera l’objet de la même attention en termes de sécurité et de protection des données personnelles ? À l’heure où encore beaucoup de sites « payants » ont du mal à respecter les normes et le RGPD, cela semble complètement illusoire.
Qu’en-est-il également des CGV qui doivent être idéalement rédigées par un avocat, leur demandera-t-on, à eux aussi, de les fournir gratuitement ? Le risque est d’autant plus grand que les sites marchands sont logiquement amenés à stocker les données personnelles des clients et même leurs moyens de paiement.
Comment faire pour la maintenance et l’hébergement ?
Qu’arrivera-t-il après la mise en production du site ?
Les prestataires vont- ils accepter de maintenir sur la durée des sites gratuits ? Il est fort probable que non. Cela expose, là aussi, ces sites à de lourds problèmes de vulnérabilités en cas d’obsolescence ou de mauvaises manipulations.
Côté hébergement le problème est le même. Héberger son site a un coût annuel, mais qui paiera ?
Le bénéficiaire ? Impossible il n’est, selon le communiqué, pas supposé être engagé dans la durée ?
Le prestataire ? Peut être au départ, mais pourquoi le ferait-il sur plusieurs années ? L’hébergeur ? À eux aussi on devrait demander une prestation gratuite sans aucun critère et au détriment de l’égalité ?

Dégâts sur l’environnement

Même si l’empreinte numérique du web est invisible, chaque octet compte ! Ces sites inutiles ou tombés en désuétude vont contribuer à une pollution numérique toujours plus importante.
Là aussi, une simple réflexion aurait pu mettre en évidence d’autres solutions. Une plateforme de ventes mutualisée, sécurisée et maintenue aurait été déjà plus bénéfique qu’une multitude de sites individuels.
Du côté des réseaux sociaux, Facebook, entre autres, propose une partie boutique. Les PME et artisans ont souvent déjà une présence sur ces réseaux, l’ajout d’une boutique temporaire, même si c’est une solution contestable, leur aurait permis de poursuivre leur activé en profitant du soutien de leur communauté et surtout sans le développement lourd et coûteux d’un site.

Un manque évident de réflexion

Les éléments précédents montrent que cet appel est le fruit d’une décision prise à la hâte et sans réflexion. Pourquoi ne pas avoir d’abord effectué une concertation avec las acteurs du numérique ? Nous demandons donc le retrait de ce projet afin d’apporter une aide réelle et efficace aux artisans et PME et non pas simplement une proposition « poudre aux yeux » qui ne fera que déplacer le problème ou en créer de nouveaux !

Auteur : Laura

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