Faisant face à une pénurie d’espaces pour organiser des concerts, un « collectif de collectifs » s'est structuré et a adressé une lettre ouverte aux élu·e·s de la ville de Brest. L’initiative, soutenue par 25 bars, associations, labels et lieux artistiques, est une première réponse aux écueils qui menacent une scène locale pourtant bien vivante. En signant cette pétition, vous participez au soutien de cette démarche.
Madame, monsieur,
Nous, associations brestoises de la scène musicale alternative, participons pleinement de la vie culturelle et festive de notre ville. Les concerts que nous organisons bénévolement, pensés pour être accessibles au plus grand nombre, accueillant des groupes locaux ou venus de loin, drainent un public nombreux. Loin d'être de simples passe-temps, ils rythment nos vies et nos sociabilités.
Nous rencontrons pourtant des difficultés croissantes dans l’organisation de nos évènements. C’est pourquoi nous souhaitons attirer votre attention sur l’inquiétante pénurie d’espaces d’expression à laquelle nous faisons face.
Premièrement, si la destruction de la salle de l’Avenir a été un cataclysme pour les cultures alternatives à Brest, nous ne pouvons que déplorer la poursuite d’une politique répressive touchant les bars, particulièrement à Saint-Martin, mais pas seulement. Les menaces de fermeture administrative pesant sur des établissements accueillant, parfois depuis des décennies, des concerts, déstabilisent gravement la scène locale. Les agendas des rares établissements où il est encore possible d’organiser des évènements s’en trouvent saturés, générant une situation délétère pour l’ensemble des acteurs impliqués.
Deuxièmement, nous regrettons qu’une association s’étant engagée dans l’acquisition d’un local ait été entravée dans ses démarches par vos services. Ce projet avait pour objectif de disposer enfin d’un espace légal et non-commercial en adéquation avec certaines de nos activités. Le droit de préemption exercé par la municipalité, puis le caractère manifestement inadapté du local proposé en compensation, montrent le peu d’égard que la majorité en place accorde à la vie associative locale.
Troisièmement, les salles existantes, telles que La Carène ou le Vauban, sont coûteuses au regard de la plupart des évènements que nous organisons. Surtout, leur fonctionnement est en inadéquation avec notre volonté de nous organiser de manière horizontale et inclusive. Pour autant, la majorité des projets programmés sur de gros festivals et au sein de lieux institutionnels ont commencé grâce au tremplin que représente notre scène. Ce processus est permis grâce à une économie qui repose sur le bénévolat. Les SMAC et autres scènes conventionnées observent avec intérêt le vivier artistique que nous soutenons. Sans les actions que nous portons, c’est tout un système qui s’écroule.
Enfin, malgré la bonne volonté de quelques salles de quartier enclines à accueillir des événements, cela ne suffit pas à pallier à l'ampleur de nos besoins. Parmi les contraintes auxquelles nous faisons face, nous pouvons par exemple citer : des jauges trop restreintes pour le public attendu, une structuration sous forme d'association, un nombre d'événements limité à l'année, des demandes de débit de boisson à soumettre trois semaines minimum en avance - ce qui ne permet pas d'accueillir au pied levé des groupes en tournée, etc.
Dans ces conditions, porter nos initiatives nous semble de plus en plus difficile. L’auto-organisation, qui constitue le socle de la vie culturelle brestoise, est entravée, si ce n’est réprimée. Une réalité bien éloignée de « l’esprit libre » célébré par votre dernière campagne de marketing territorial, qui apparaît à beaucoup, au regard de ces observations, comme relevant d’un certain cynisme.
Malgré cette détérioration croissante du milieu alternatif brestois, de nouveaux collectifs venant, avec leurs réseaux respectifs, de divers horizons sonores se sont récemment constitués. Partageant le constat d'un décalage manifeste entre cette belle dynamique et les difficultés rencontrées, nous avons décidé au cours des derniers mois, de nous constituer en « collectif de collectifs » dans l'objectif de porter des revendications communes.
C’est pourquoi nous demandons tout d'abord que cessent les pressions exercées sur les bars accueillant des soirées musicales.
Brest entre en période de campagne électorale pour ses municipales 2026. Nous souhaitons que la culture alternative et les lieux de liens sociaux que sont les bars ne soient pas sacrifiés sur l'autel d'une surenchère démagogique et sécuritaire.
Il serait possible de s’inspirer de l’exemple de la ville de Nantes, qui a adopté en 2019 la règle dite de « l’antériorité ». Celle-ci permet a minima de sécuriser l’écosystème des cafés-concerts existants, dans la mesure où il n’est plus permis à des riverains ayant emménagé en connaissance de cause à proximité d’un bar de réclamer l’arrêt de ses activités sous prétexte de nuisances.
À Brest, la pénurie actuelle d’espaces d’organisation rend cette mesure de bon sens indispensable, mais non suffisante. Nous restons donc ouverts à toute proposition de votre part.
Cordialement,
Ail noir, Cool Raoul, Diskar, Fun Club rade de Brest, La dernière pluie, Petit Tonnerre, Tricard
Soutiens à cette démarche: :
Club Rade Passion, Krenn Douar Sound System, Ol' Dirty Beat, Conne Action, Kazh Du, Les amis de la place Guerin et ses alentours, Café de la Plage, Coco's Bar, Triskell Bihan, Last Player, Le Grabuge, L'horizon sonore, Ty Kall, Le Comix, Youtar, Zines of the zone, Editions Autonomes, Vivre la Rue, Label French Wine Records & Panem Vinum, Bureau Falaise, Larm, Monotrem, Plantes vertes, Le Feu à Droite, Cultures Bar-Bars, Atelier Carnot, Vinyl shop Saint-Martin, Association Penn Ar Dead, La Carène & de nombreux autres labels, groupes, collectifs, artistes, associations, brestois et brestoises qui participent activement à cette scène
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